Il était enfin arrivé à destination. Il ne savait comment, mais il avait réussi à survivre aux terribles événements de Santébaun. Au moins il y avait appris que le monde ne se réduisait pas humains, elfes et orques... Démons et anges l'arpentaient aussi. Tout n'avait été que mensonge pour le jeune Alen'Di qui ressentait une véritable haine à l'égard de ces créatures nouvelles pour lui. Mais surtout il était en colère contre lui même... Il aurait du s'y attendre. Les reliques magiques qu'il convoitait était parfois d'une telle puissance qu'elle ne pouvait venir de ce monde. Une fois le choc initial passé, - qui avait été d'une violence extrême - il avait presque réussi à s'habituer à l'horreur constante qui régnait dans Santébaun. Mais il ne pouvait pas se laisser abattre et abandonner ses rêves à cause d'une simple peur de l'inconnu. Le Mirage secoua la tête et reprit sa marche, vers l'océan. Le chemin qu'il avait emprunté traversait une petite bourgade, qui lui avait confirmé que ce qu'il cherchait était non loin. Il ne lui restait qu'à se jeter dans le vide et faire un petit brin d'escalade. Après une petite heure sur un sentier pentu, Alen'Di atteint enfin le sommet de la falaise, et se coucha dans l'herbe, la tête dans le vide. Le vent soufflait violemment et s'écrasait en hurlant contre la paroi rocheuse déchiquetée. De puissantes vagues s'écrasaient plus bas, éclaboussant jusqu'à dix mètres de hauteur la pierre blanche. Le jeune homme laissa échapper un rire nerveux : finalement ça allait plus dur que prévu. Inutile de préciser que toute chute serait mortelle, car aboutissant sur des flots déchaînés hérissés de pointes rocheuses. Mais au fond c'était bien le risque qui rendait cette vie si plaisante. Avec un sourire sur les lèvres, Alen'Di se laissa tomber dans le vide, se rattrapant du bout des doigts à une saillie de calcaire. Il ignora la douleur et le sang qui commençait à couler du bout de ses doigts, et commença à descendre. Lentement, mais avec moult précautions. Le moindre faux mouvement serait fatal, tant le vent était fort. Il entendait les mouettes rire en faisait des cercles au dessus de sa tête. Ces salopes amatrices de charognes attendaient qu'il se brise le coup en contrebas pour festoyer de ses entrailles. Après une bonne demi-heure d'escalade, le chercheur de trésor trouva enfin un large renfoncement dans la falaise. Il avait du servir de nid à un albatros mais aujourd'hui il était désert et abandonné. Il sortit un peu de bois mort de son sac et fit un feu, protégé du vent par une paroi rocheuse. Alors le Mirage s'équipa de son arc, encocha une flèche et visa. Cette dernière siffla dans l'air en tournoyant lorsqu'il relâcha la corde, avant de se ficher dans le poitrail d'un oiseau. Alors que son cadavre chutait vers l'océan, ses comparses mouettes s'enfuirent en poussant des cris affolés.

- Héhé, fuyez salopes de mouettes.

Après un repas frugal, Alen'Di éteint le feu dans un torrent de poussière et reprit sa dangereuse descente. Il était désormais à mi-chemin de la falaise, aussi il devrait bientôt trouver la caverne... Suspendu par une main avec un arbre qui avait eu l'idée saugrenue de pousser à l'horizontal, le jeune homme cherchait des yeux une large cavité. Au moins il n'entendait plus le rire agaçant des oiseaux... Enfin ! Alen'Di lâcha la branche et se rattrapa contre un mur percé de dizaines de trous, juste au dessus de la grotte. Il se laissa alors glisser contre la paroi humide, atterrissant sans dommage. Bon il avait les mains et les doigts complètement déchirés, mais c'était rien à côté de ce qui se serait passé s'il avait chuté. Après avoir bandé ses plaies et allumé une torche, le Mirage s'enfonça dans l'obscurité.
Après une petite heure à s'enfoncer dans le ventre de la terre, - ou de la mer, il n'en savait trop rien - l'épéiste eut la désagréable sensation d'être suivi. Mais à chaque fois qu'il se retournait, il ne voyait que les ombres danser au rythme de sa torche. Il réprima un frisson et continua d'avancer, une main sur la poignée de Lenaa.

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L'eau qui suintait du plafond par de très minces interstices ne trompaient pas : Alen'Di était désormais sous la mer. La caverne suivaient une rivière, à peine plus large qu'une barque, mais dont l'eau était aussi salée que l'océan. Au fur et à mesure que le jeune homme avançait, son objectif se dévoilait à lui. Ici et là des signes qu'une civilisation avait effectivement vécue ici. Des blocs de pierre gravés, des semblants d'habitations taillés à même la paroi rocheuse. Bientôt il n'eut presque plus besoin de flamme : des algue phosphorescentes diffusaient une leur bleuâtre apaisante. Soudain, des bruits de succion étranges résonnèrent dans le dos d'Alen'Di. Le Mirage se retourna d'un bond, sabre au clair, torche brandie. Une petite silhouette noire se fondit dans le décor déchiquetés que formaient stalagmites et stalactites. Un frisson parcourut son échine et il se remit à avancer... Il ne savait pas qu'elle était la chose qui le suivait, mais il ne voulait pas prendre le risque de tomber dans une éventuelle embuscade en rebroussant chemin.
Quelques minutes plus tard, l'épéiste se tenait devant deux énormes battants de pierre. Haut de près de six mètres, ils touchaient presque le plafond de la caverne. Ils avaient plusieurs siècles, et la roche était aujourd'hui couvertes de coquillages morts, de mousse et d'algues luminescentes. Émerveillé, Alen'Di laissa courir sa main sur la pierre... Les Portes de Grès. Derrière elle se situait la capitale troglodyte d'un Empire qui jadis régnaient sous la terre et sous la mer. Ou du moins, ce qu'il en restait. Les historiens ne savaient pas encore pourquoi ce peuple s'était aussi subitement effondré. Certains parlaient d'une épidémie fulgurante, d'autres évoquaient un effondrement des galeries souterraines suivi d’inondations. Les plus fous écrivaient des livres à propos de démons des profondeurs. Si quelques mois plus tôt il aurait rit au nez de tels "érudits", désormais il ne pouvait que ressentir une peur viscérale. Le jeune homme secoua la tête et se concentra sur son objectif immédiat : comment entrer ? Il recula de quelques pas, afin d'avoir une vision d'ensemble des portes. Elles étaient hermétiquement closes et il ne voyait absolument quelle force pouvait voir de tels blocs de pierre. Mais l'érosion avait fait son oeuvre, et une mince fissure courait le long d'un des battants, pour finalement s'élargir en une brèche, tout en haut. Un sourire illumina le visage du Mirage qui éteint sa torche avant de la ranger dans son sac en toile. Alors il entreprit l'ascension. La roche était devenue si irrégulière que l'escalader était un jeu d'enfant. Quand il arriva au niveau de la fissure, ce fut plus simple encore et l'instant suivant il était assis sur la tranche des massives portes de pierre. Il n'eut alors qu'à se laisser glisser contre la paroi humide, de l'autre côté.

Il ne put réprimer un cri de surprise. Il était entré dans Qa'Aloch. Une gigantesque ville taillée dans la pierre, sous les flots tumultueux de l'Océan, mais parfaitement au sec. L'ingénieux éclairage inventé par le peuple qui y vivait fonctionnait toujours, et des lampes magiques remplis d'algues phosphorescentes flottaient ici et là. De véritables fleuves souterrains découpaient la cité en différents quartiers, et l'on pouvait voir ici et là ponts ports et épaves. Au coeur de l'immense caverne, un trou dans la voûte laissait tomber une énorme cascade salée, d'une puissance foudroyante. Un sentiment de tristesse s'empara du coeur d'Alen'Di. Il n'y avait ici plus que ruines et cadavre... Les Portes de Grès avaient été placé en hauteur par rapport à la ville. Où plutôt les habitants de Qa'Aloch avaient du creuser le sol pour que la grotte soit suffisamment grande pour accueillir leur ville. C'était tout bonnement fascinant. Il descendit les escalier et s'engouffra dans la ville fantôme.

Alen'Di était en train d'arpenter les rues désertes, qui constituaient un véritable dédale de pierre, quand il entendit à nouveau un bruit derrière lui. Des bruits de pas précipités... Il eut seulement le temps de dégainer son sabre qu'il sentit quelque chose de lourd se jeter sur lui, au niveau de sa jambe. Il réagit rapidement, frappant violemment l'attaquant de son pied droit. Il sentit que ce dernier s'enfonçait dans une chair tendre et molle : il avait du toucher l'estomac. Alors il vit que la chose était un enfant humain, ou du moins en avait l'apparence. Au moment où il avait bondit sur lui, il avait crié quelque chose d'étrange à propos d'un "grand frère". A qui ce gamin pouvait-il bien parler ? Alen'Di se retourna, et scrutant les alentours du regard. Pas une âme... Deux solutions restantes. Soit l'enfant était fou et s'adressait à quelque spectre, soit c'était à lui qu'il s'était adressé. Dans tous les cas, il était fou, car le Mirage n'avait plus aucune famille, et encore moins un petit frère. Mais comment avait-il pu arriver jusque ici ? Il était bien trop jeune et chétif pour avoir escaladé la paroi seul, il devait être accompagné. Alen'Di allait devoir faire parler le mioche. Il le tata du pied pour vérifier qu'il était vivant et quand le petit roula sur lui même, il plaça la pointe de Lenaa sous sa gorge.
- Qui es-tu et que fais-tu ici ?
Sa présence ici ne présageait rien de bon, et le jeune craignait qu'il ne soit en train de tomber dans un piège, tendu par d'éventuels nouveaux habitants de Qa'Aloch, ou d'autres chasseurs de trésor. Un sourire espiègle illumina son visage alors qu'il pressa légère sa lame contre la peau nue de l'enfant, faisant perler son sang.