Au Village des Damnés [Roxana - Arawn]

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Au bord du lac, dans la brume rôdant, demeuré un des plus ancien village du Vein. Les habitations - si l'on pouvait nommer cela ainsi, étaient toutes en pierres. Elles ressemblaient d'ailleurs d'avantage à des espèces d'amas de pierre qu'à de réelles demeures. Ici vivaient les créatures du monde du dessous ayant refusée l'errance. Une espèce d'organisation démoniaque, de civilisation chaotique, d'un système politique anarchiste. Ceux qui ne voulaient - ou ne pouvaient plus errer dans les plaines morbides décidèrent il y a bien longtemps de construire des toits pour se protéger de la pluie, des trous pour faire du feu et cuire de la nourriture, des arbres et des feuilles mortes pour dormir. L'entreprise fût d'abord raillé par tous les autres (cela se passa bien avant la proclamation d'un roi pour le Vein, depuis plusieurs lieux sédentaires existent). Le village qu'on nomma Le Maudit, puis, Les Damnés, fût attaqué à bien des reprises par ceux qui refusaient que des créatures de l'enfer puissent décider de vivre comme ceux du milieu, cela était une honte, une traitrise même. Il fallait les anéantir. Mais ils résistèrent, des remparts furent élever, plus les années passés, plus ils étaient nombreux. On finit par les laisser en paix.
Aujourd'hui, ceux que l'on nomme les Damnés du lac, sont une petite trentaine. Ils vivent dans une espèce de communauté où chacun se débrouille comme il peut, où, les voisins s'amusent à se détruire mutuellement les habitations, où chacun passe ses journées à faire tout son possible pour être le plus odieux, le plus ignoble, le plus méprisable possible (et cela demande du temps et de l'effort). Le village des Damnés est aussi devenu un point de rencontre, d'échanges d'informations, de non-repos. Il n'est pas rare qu'un démon se reposant trop dans son errance quotidienne, décide de passer quelques jours en ce lieu pour retrouver une bonne vieille haine de tout être, une méprise de ses confrères.
Zimm marchait en tête, un livre sous le bras, ce qui ne lui ressemblait pas et déjà il se préparait à attendre les moqueries de ceux qu'ils croiseraient. Juste à ses côtés, Roxana avançait au même rythme que lui. Tous deux avaient sous les yeux de pénibles cernes (très voyantes chez Zimm, bien moins chez Roxana). Cela faisait un certains temps qu'ils allaient ainsi, sans nourriture, avec de l'alcool comme unique énergie, sans sommeil. Inutile de dire, qu'après plus de vingt heures de marche, en plus de l'odeur de sueur qu'ils trainaient avec eux, leur visage affichait une amabilité et un désir de rencontre tel qu'on avait immédiatement envie de leur parler.
Ils étaient alors affreusement repoussant et ne s'en plaignaient pas.
C'est ainsi qu'ils entrèrent au village, se rendant immédiatement à ce que l'on nommait la Taverne. Qui n'était qu'un tas de pierre un peu plus haut que les autres, creux à l'intérieur, il y avait là des tables et des espèces de lits qui vraiment ne ressemblaient à rien. On mangeait, on dormait, on se battait, tout dans la même pièce. Le dirigeant du lieu était une démone à la poitrine aussi grosse que sa tête grasse. La géante aux yeux blancs faisait plus de quatre mètre de hauts, ses mains dodues pouvaient aisément écraser une tête juste en la serrant (ce qui lui était arrivé de faire à plusieurs reprises), ses cheveux étaient attachés en chignon, son haleine puait l'alcool, il fallait l'insulter pour être servit, et elle ne se faisait payer qu'en nature (par les femmes comme par les hommes). Son nom faisait trembler les murs, c'était Lory.

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Un pied devant l'autre, un pied devant l'autre... C'était là l'unique pensée de Roxana. Elle avait atteint les limites de l'épuisement plusieurs heures auparavant, mais rien n'aurait pu la décider à arrêter de marcher aux côtés de Zimm. Les combats, le sort, l'interminable marche, toutes ces choses qui l'avaient éreintées, s'effacèrent en un instant de son esprit lorsqu'ils atteignirent enfin leur destination. Le village n'était rien de plus qu'un amas de cailloux disposés en cercle à ses yeux, mais peu importe. Tout ce qu'elle voulait c'était se laver de toute cette crasse et prendre du repos.

Pas un frémissement sur son visage ne trahit ce qu'elle pensait quand elle découvrit l'intérieur du lieu nommé "Taverne" qui n'en avait en fait que le nom. Suivant docilement Zimm, elle resta silencieuse. Minuscule à côté de lui, elle l'était encore davantage face à la tenancière qui tenait plus du monstre de conte de fée que de l'aubergiste. Elle n'était plus tellement capable de réfléchir de manière cohérente et le fonctionnement de ces lieux lui échappait totalement. S'en remettant à Zimm qui semblait connaître l'endroit, elle se rapprocha un peu de lui et leva les yeux vers les siens comme pour lui dire "Démerde toi pour nous obtenir ce qu'il nous faut".

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Spoiler:

Juste après les deux aventuriers exténués, l'entrée de la Taverne fit apparaitre un nouvel individu. Si les deux premiers étaient sales et fatigués, lui était tout à fait l'inverse, frais et éveillé comme un gardon. Enfin, le contraste se serait plus vu si le nouvel arrivant n'arborait pas sur lui une humeur assez sombre pour quasiment se détacher de sa personne. On aurait dit qu'il trainait cette obscurité avec lui comme d'autres tirent leurs affaires, l'obscur aspect de ses traits semblant s'imposer un peu malgré lui sur sa personne, tel un naturel sans cesse chassé et toujours revenu au galop. Depuis le temps, Arawn ne faisait plus attention à cela de toute manière, faire des efforts inutiles pour paraitre aimable l'avait depuis longtemps lassé. Après tout, ceux dont il pouvait encore se soucier de l'avis le connaissaient assez pour savoir ce qu'il en était à son propos, qu'il ait l'air d'un sombre type peu abordable aux autres lui était du coup complètement égal. En général, cela pouvait même l'aider, les combats venaient comme cela d'eux-même à lui, même pas besoin de se déplacer pour aller les chercher. Quoi qu'ici, cela risquait d'être diffèrent vu qu'il se trouvait dans le Vein, endroit plus habitué à de sales têtes biens pires que la sienne plutôt qu'a d'innocents sourires. Pas plus mal d'ailleurs, devoir fumer quelques jeunes démons prétentieux qui seraient venus lui chercher des noises n'aurait pas débuté son retour dans le coin sous de très bons auspices. En effet, cela faisait déjà pas mal de temps qu'il n'était pas revenu ici, mine de rien...50 ans au moins, non? Il avait arrêté depuis longtemps déjà de compter des dates, devenues inutiles pour lui. Le seul jour qu'il aurait à connaitre serait celui de sa délivrance, à part cela, les autres, pour ce qu'il en savait...un jour était comme un autre jour, non? Seul changeait ce que l'on en faisait!

Et pour aujourd'hui donc, le chef de clan était retourné dans les terres démoniaques, passant pour cela au travers d'une des nombreuses failles dimensionnelles que sa vie de nomade l'avait emmené à connaitre. Et pour une fois, il était arrivé jusqu'à la "Taverne" sans se faire menacer par un jeunot en manque de victime. C'était un progrès appréciable, il n'aimait pas perdre son temps dans des combats sans goût à l'issue trop prévisible. Il faut dire que son apparence ne l'aidait pas vraiment à passer pour un type qu'on ne voudrait pas attaquer, à l'origine. Pas de cornes, de peau rouge, de regard ardent ou toute autre trait habituel démoniaque qui aidait beaucoup de démons à s'imposer auprès des humains crédules. Non, lui avait le corps d'un tout simple humain, même pas trop musclé d'ailleurs ni grand ou large, on aurait dit un jeune homme tout juste adulte à le voir de loin. Ce n'était qu'une fois vu de plus prés que l'on pouvait revoir son jugement en se rendant de la noirceur des traits de l'homme, les muscles discrets mais parfaitement dessinés le long de son corps, une démarche à la fois souple et assurée et un regard qui semblait avoir vu plus d'existences tombes que de feuilles des arbres, trahissant une existence bien plus complexe et ancienne qu'il n'y paraissait. A la lueur des lieux, on pouvait voir se distinguer sur lui les larges tatouages bleutés qui lui couvraient une bonne partie du corps, s'enroulant autour de ses muscles quand ils n'étaient pas cachés par le large manteau quadrillé de vert et de rouge qu'il portait, orné de broches stylisées. Deux armes se trouvaient d'ailleurs rangées dans son dos, accrochés à ses sangles, dévoilant ainsi au dessus de chacune de ses épaules les poignées de deux sabres. Mais quand il eut dépassé les gens pour s'avancer vers la tenancière du lieu, on put voir plus distinctement la longue lame fine d'un katana et celle bien plus large et courte d'un sabre style d'abordage.Ces deux lames avaient une teinte d'ébène et sentaient la magie à plein nez, tels de sombres relents pour ceux un tant soit peu habitués à la magie comme les démons. Les pouvoirs des lames noires ne donnaient jamais de belles impressions après tout, c'était dans leur nature....

Mais en ce qui concernait cet homme encore inconnu, il sembla ne pas faire dans la dentelle vu qu'il se planta droit devant Lory et lui assena d'une voix ferme et portant nettement moqueuse les paroles suivantes:

Hé bien ma grosse vielle, tu n'as toujours pas perdue ta carcasse depuis le temps? Quand est-ce que tu gouteras enfin à l'air du voyage au lieu de pourrir sur pieds ici?

La géante le fixa un instant, comme si elle avait du mal à faire le point sur celui qui venait de se pointer ainsi devant elle, puis au bout d'un instant un grand sourire se dessina sur ses lèvres, ce qui curieusement ne fut pas vraiment rassurant. Elle colla alors soudainement une grande claque dans le dos de l'apparent jeune homme, qui contre toute-attente ne s'effondra pas pitoyablement par terre mais tint bon le coup...le choc l'avait quand même remué de la tête aux pieds mais ce n'était pas grand chose vu la force de la bonne femme. Comme de rien n'était, Lory répondit alors en suivant sur le même ton moqueur de son interlocuteur, ce qui avec son timbre de voix était nettement plus inquiétant.

Et toi tu n'es toujours pas crevé, freluquet? Rester avec tes barbares a pas l'air de te rendre mieux foutu pour autant, tu finiras par plus pouvoir te sortir le cul d'ici, tu verras! En attendant fout-toi dans un coin et me pète pas ta crise ici, j'ai pas besoin d 'autant de clients en moins!

La démone s'était montrée assez polie pour le coup, c'était assez étonnant de sa part. Il faut dire qu'Arawn la connaissait pas depuis qu'il avait découvert le Vein mais pas loin ensuite, alors même si ses visites étaient assez espacées, cela faisait assez souvent depuis le temps pour qu'il soit plus familier avec elle. Souriant à ce qu'elle venait de dire (elle était une des rares à pouvoir lui évoquer sa vraie nature sans le contrarier), il alla donc tranquillement se mettre à une table ronde libre non loin. Il semblait ne rien vouloir commander ni même attendre autre chose, tout simplement s'assied-il sur une chaise à moitié cassée comme sur un trône puis sembla tout simplement se trouver bien là, immobile, seul son regard allant d'un bout à l'autre de la salle comme en pleine enquête, aussi froid et dur qu'une lame un soir d'hivert.

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Ils s'étaient assis autour d'une table, discrets, ils observaient le nouvel individu de la taverne. Il semblait bien connaitre les lieux. Pourtant, Zimm ne le connaissait pas. Certes, il venait rarement dans ce coin, mais au file de ses visites il était tout de même parvenu à connaitre tous les habitants du village, ainsi que les voyageurs habituels. Peu lui importait.
Pour le moment, il n'avait pas envie de parler, juste de rester assis et profiter du bonheur des jambes étendues, le doux fourmillement de sa chair.
Lory s'approcha d'eux et s'exclama avec sa douce voix d'ours cancérigène :
- Alors, tu ramènes encore ta carcasse ici. Elle cracha sur la table, c'était ainsi qu'elles se nettoyaient. Tu prends quoi ? Consommation obligatoire, je veux pas perdre mon temps.
- Deux repas et une nuit.
Il afficha un large sourire qui lui déformait complètement le visage, faisant apparaitre ses dents sales. Ses larges bras frappèrent sur la table. Ah ! Ca me fait plaisir ça ! Se tournant ensuite vers Roxana elle s'exclama en postillonnant : Et la coquine ? C'est ta nouvelle ? Tu la bouffes ou tu la garde celle-là ? Fait attention à lui petit vers, il est très vilain !
Sans attendre de réponse, elle tourna ses pieds sales et poilus pour aller préparer la nourriture. Si on pouvait appeler ça nourriture. Sorte de bouillie noire et informe, froide, pleine de grumeaux et lourde sur l'estomac. Il n'était pas rare de voir des aventuriers trop fragiles mourir d'intoxication alimentaire, quand ils ne mouraient pas dans les bras de Lory au moment de passer à la caisse.

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Roxana avait suivi Zimm sans un mot, prenant place sur la chaise voisine de la sienne. Elle étendit tout d'abord ses jambes, puis en replia une contre elle et l'entoura de ses bras. Elle avait probablement l'air d'un bébé oiseau tombé du nid et complètement dépenaillé, mais à ce stade elle s'en foutait comme de sa première paire de bottes. Elle leva les yeux vers la tavernière plutôt impressionnante, même à côté de Zimm, et fit la moue à ses paroles.

Si j'étais toi je parierais pas sur qui va bouffer qui...

Elle avait déjà tourné les talons mais qu'importe, La répartie était plus pour elle-même que pour la dénommée Lory. La nourriture était une bouillie infâme, mais elle avait tellement faim qu'elle aurait bouffé sa chaise au besoin. Elle sortit de sa besace une petite flasque et versa un peu de son contenu dans son écuelle puis touilla grossièrement avant d'enfourner la mixture. Tout en mangeant, elle commençait à observer les occupants de la salle. L'un d'eux en particulier retint son attention. Pour une fois qu'un démon ne faisait pas le double de sa taille. Elle le détailla sans vergogne, peu lui importait qu'il s'en offusquât, elle était prête à se battre s'il le fallait. Reportant son attention sur Zimm, elle lui offrit une moue blasée.

Qu'est-ce qu'on va trouver dans ce bouge à ton avis ?

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Alors qu'il observait la salle, Arawn n'avait pu que se rendre compte du regard de la démone d'allure modeste arrivée juste avant lui et attablée avec un congénère aux airs biens plus démoniaques. Plutôt que de s'en offusquer, il se contenta de se demander s'il s'agissait là d'un défi ou non. Une fois perçu son état, il fut évident que cela ne semblait pas être le cas, bien que son regard laissait entendre qu'elle en avait encore à revendre. Le guerrier s'en détourna alors pour fixer à présent le vide, comme perdu dans ses pensées. Cette observation l'avait au moins rassuré sur un fait, il y avait toujours des démons qui restaient simples et efficaces de nos jours, pas comme la plupart des clients actuels qu'il pouvait voir, qui faisaient plus dans le spectaculaire qu'autre chose. Franchement, à quoi cela rimait trois paires d'yeux en plus, une peau bleutée craquelée de pustules ou bien une taille de géant? Depuis trop longtemps la plupart des démons semblaient se renfermer sur le plus bizarre et horrible possible, comme pour se rassurer et se distinguer le plus possible des autres mondes. Après tout, même si chaque individu n'avait pas forcement le choix sur son apparence de naissance, chaque naissance résultait d'une certaine volonté du chaos ambiant sur le plan démoniaque, reflet de tendances. Sans parler des nombreuses possibilités par la suite de modifier son apparence. Non, franchement, la plupart des démons d'aujourd'hui en faisaient trop. Comment vouliez-vous ensuite réussir à trouver un combattant potable dans le lot sans devoir déterminer d'abord s'il savait faire autre chose de son quatrième bras que se gratter la tête?

Soupirant à cette vue généralement plutôt navrante, l'apparent jeune homme restant pourtant résolument assis à ne rien faire, sans même commander ou faire mine de partir. Il savait pourtant pertinemment ce qui lui pendait au nez, à agir de la sorte en un tel lieux avec l'apparence qu'il avait. Seulement le chef de clan ne comptait pas changer d'attitude simplement parce que quelque chose de désagréable surviendrait. Faire rire un caillou semblait alors plus facile que de le faire changer d'attitude quand il l'avait décidé, voila ce que l'on disait parfois chez les siens quand ou voulait expliquer simplement la chose à un nouveau venu. Et même dans le Vein, Arawn n'avait pas plus coutume de déroger à ses principes. Aussi quand une bande de trois grands costauds de trois mètres vinrent l'encercler, cela ne surprit pas plus que cela le tranquille usager, qui se contenta simplement de jeter un regard morne et sombre sur leurs corps et leurs équipements. Hache à deux mains, épée longue et marteau de guerre, chacun porté par un démon dans le plus pur style infernal, d'un rouge ocre aux muscles saillants et aux fines pointes sortants de la la peau un peu partout pour se terminer par des visages dont ne ressortais qu'une immense gueule garnie de crocs et surmontée de petits yeux avides. Pourtant, malgré ces airs des plus sérieux, les quelques gestes qu'ils avaient faits pour arriver jusqu'à lui avaient permis à l'homme attablé de se faire une idée, du moins de leurs compétences physiques pures, hors magie. Et si il ne se basait que sur cela, il savait déjà comment cela finirait. Le tout était ensuite de faire en sorte que ce qui n'était pas prévisible n'ait jamais à se montrer.

Restant toujours rivé à sa chaise, ne portant pas plus ses mains à ses armes mais les gardant tranquillement posées sur ses genoux, la future cible imminente prit la parole avant que les trois gaillards n'aient même pu le faire. Mais il s'adressa plutôt par dessous eux à la patronne de l'établissement.

Ohé, mocheté, tu as toujours pas renseigné tes clients depuis le temps? Pas étonnant que tu sois toujours en rade si tu les laisse aller si facilement!

Lory rétorqua alors sans sembler se détourner de son comptoir et de sa prochaine tambouille à prépar....pardon, à gâcher. Sa voix aurait pu sembler aussi nonchalante que celle du petit guerrier si elle n'avait pas eut la sonorité d'un moteur rouillé.

Ils passent que depuis 50 ans, comment tu veux qu'ils sachent? Et puis ils sont venus pour se battre ce soir, alors autant qu'ils se servent.

Visiblement, tout cela ne plus pas au plus excité d'entre eux, celui à l'épée, qui semblant voir encore plus rouge qu'il n'était déjà porta sans attendre un grand coup de son épée sur l'endroit ou se trouvait l'air de rien le truc qu'il comptait auparavant tabasser gentiment. Cela lui apprendrait à le sous-estimer! Car le bonhomme n'avait pas frappé comme toute autre bute épaisse classique, un grand coup de fendoir de haut en bas facilement prévisible. Non, lui et ses frères n'en étaient pas à ce point là tout de même, son coup fut bien plus efficace dans le sens ou il chercha directement à transpercer d'un coup en pleine poitrine sa cible, sa lame la pointe en avant pour filer d'estoc depuis sa position basse sans passer par une posture de garde. Bon, cela finirait plus rapidement qu'il aurait prévu les choses, mais l'autre l'avait cherché. Il n'aurait même pas besoin de se servir de sa mag....

L'instant d'après, le cours des pensées du démon furent brusquement interrompus par une boite crânienne subitement coupée en deux, tout comme le reste de son corps d'ailleurs. Devant les restes tombants à terre se trouvait l'apparent frêle guerrier, tenant d'une main un large sabre d'abordage qu'il avait violemment utilisé pour fendre eux deux le démon. On en survit pas après tout 500 ans sans avoir quelque peu travaillé ses réflexes, et ce n'était pas un simple coup d'estoc qui allait lui rendre gorge seul. Le désavantage de ce genre d'attaque est qu'il suffit de se glisser d'un pas sur le coté pour que le coup vous passe à coté sans le moindre mal. Arawn l'avait fait en se propulsant subitement hors de sa chaise d'une impulsion de ses jambes, déjà prêtes malgré leur posture assise, et avait dans le même mouvement dégainée en un large arc de cercle vertical une de ses épées pour l'abattre en redescendant droit sur son adversaire. Il avait alors appliqué une force démesurée que ne jugerait pas son apparence pour le trancher littéralement en deux. Inutile en fait, tout comme en soit le fait d'avoir fini si vite ce combat, mais le guerrier souhaitait avec cette démonstration exagérée calmer tout ceux qui ne pensaient que par la force et qui voudraient encore lui chercher des noises en étant si faibles. Ce qui pour le coup sembla au moins suffire pour les comparses du monstre tranché vu qu'ils s'en allèrent sans demander leurs restes. Même s'ils avaient d'autres tours dans leur sac, la puissance déployée par cet être à l'air de rien les surprit tellement qu'ils n'y pensèrent pas, et le regard noir de leur apparemment futur bourreau leur suffit comme acompte. Se rasseyant comme si de rien n'était, les pieds dans le sang et les restes encore frais du démon, le combattant des clans fut au moins soulagé. Avec cela, les petites frappes ignorantes devraient l'éviter et les combattants sérieux peut être le chercher. Il n'avait en plus pas perdu trop de temps à un truc aussi ennuyeux qu'un combat sans envergure, et c'était franchement tant mieux. Pour lui, cet échange ne signifiait rien de ce qu'était vraiment l'art du combat, mais cela suffisait au moins comme prévention. Il aurait pu battre ce type d'une toute autre façon, mais la plus simple restait ce qui marchait le mieux comme message chez les bas de plafond de son genre. Et de son genre à lui aussi, il devait bien l'avouer, on ne vit pas dans un clan de Feleth en finisse et douceur la plupart du temps.

En attendant, il s'accouda à sa table avec l'air de vouloir attendre quelque chose encore longtemps, comme résigné. Est-ce que celui qu'il espérait croiser était encore vivant au moins? Il devait s'avouer à présent qu'il n'avait pas pensé à cela, et préférait d'ailleurs ne pas le faire sous peine de considérer bien tristement cette journée. Il n'avait plus qu'a espérer.

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Zimm ne tourna pas la tête quand du sang gicla sur les tables à une dizaine de mètres devant lui. Tout cela est habituel, pathétique, sans intérêt. Il ne supportait pas ces gens qui se battaient sans cesse, qui s'entretuaient sans raison... Bon, certes, lui aussi agissait souvent ainsi, mais lui ce n'était pas pour la même chose, c'était pour le plaisir, la joie, l'amusement ! Trop nombreux étaient ceux qui cherchaient les combats par ego, qui partaient dans des coins sordides et qui revenaient avec une nouvelle arme en clamant sur les toits : "observez ! observez comme je suis fort, comme je suis beau !" Toute une histoire pour finir couper en deux dans une taverne puante par un gringalet qui, si il n'a pas le physique, a la force, l'expérience et un minimum d'intelligence. Ces histoires là étaient toujours les mêmes, il les avait vu et revu trop souvent.
Roxana semblait s'impatienter. Il est vrais qu'elle lui avait posé une question à laquelle il n'avait toujours pas répondu. Par flemme. Formuler des phrases, chercher les bons mots à prononcer, trouver une réponse à une question, il n'était pas en état de faire cela. Déjà que naturellement il n'était pas un grand bavard, avec la fatigue, l'odeur de vomi de son repas, et la mauvaise qualité des clients du lieu, il lui fallait un peu de temps.
Qu'est ce qu'on va trouver dans ce bourg ?
La question avait le mérite d'être posé.
Il prit une profonde inspiration, et avant qu'elle ne lui mette un coup de pied dans les tibias (il ne la connaissait pas depuis longtemps mais était persuadé qu'elle était capable d'agir ainsi à force d'agacement et d'impatience), il improvisa ce qui pouvait ressembler à une réponse.
Il y a un grand nombre de trou du cul péteux. Une tavernière hideuse au sexe dégoulinant mais à la cervelle bien plus pleine qu'on pourrais le croire. Elle sais plus ou moins tout ce qui se passe dans le Vein. Elle écoute les conversations, elle retient les visages. Il y a de fortes chances pour qu'elle te connaisse, bien que tu n'es jamais venu ici. Bref... Elle peut te donner les informations que tu cherches. Le seul problème c'est qu'elle donne un conseil une fois par siècle environ... Disons que c'est rare qu'elle vienne en aide à quelqu'un... De manière gratuite je m'entends... Puis, autres que les fions sur patte, les Damnés sont pour la plus part assez âgé et assez instruit du fonctionnement de ces terres. Sans oublier les voyageurs. Certains connaissent les réponses à quelques mystères. La difficulté est que, dans ce genre de lieu, il faut y rester une bonne semaine avant de pouvoir obtenir un bout de piste. C'est pour ça que quand je viens, je n'y demeure pas plus de trois jours...
Au final il avait mal à la mâchoire à trop parler comme il le faisait. Il bus une grande lampé à sa fiasque et finit de grimacer avec les dernières bouchées de la purée informe.

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Dévorant avidement l'infâme bouillie grumeleuse qui commençait déjà à lui peser sur l'estomac, Roxana observa le combat qui se déroulait à quelques mètres d'eux. Pas un instant il ne lui vint à l'esprit d'intervenir. Elle ne se mêlait jamais de ce qui ne la regardait pas. Le démon qu'elle avait remarqué plus tôt, celui qui avait une taille humaine, semblait avoir les choses bien en mains. Elle resta impassible mais fut néanmoins un peu impressionnée par sa vitesse et sa dextérité. Elle-même avait cultivé sa célérité et son agilité avec acharnement, sachant que ce n'est qu'ainsi qu'elle pourrait faire le poids face aux créatures qui lu était physiquement supérieures, comme Zimm.

Elle reporta son attention sur ce dernier lorsqu'il répondit enfin à sa question. Sa réponse tombait à point nommé car elle avait atteint les limites de sa patience et s'apprêtait à lui balancer son pied botté dans le tibia sous la table. Elle l'écouta sagement sans rien dire, enregistrant le peu d'informations dont il lui faisait l'aumône puis lui adressa une petit grimace blasée en se redressant et en repoussant son écuelle vide.

Si on doit crécher dans ce bordel, on dort à tour de rôle, j'te préviens.

Jetant un bref coup d'oeil au petit démon à présent sagement assis sur sa chaise, elle le désigna du pouce à Zimm en le regardant de manière significative.

Et ce serait peut-être pas du luxe d'avoir ce zigoto là dans notre camp.

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Un instant passa et Arawn ne put s'empêcher de soupirer. Il avait espéré qu'au moins la fin de l'autre idiot en énerverait assez pour liguer une bonne partie de la salle contre lui, où alors qu'une personne bien plus compétente sorte du lot. Mais là non, rien de rien, simplement la morne routine du coin qui continuait comme si de rien n'était. Le guerrier de clan se demanda du coup combien il devrait tuer de démons pour attirer un peu de véritable action. Voila une des autres raisons pour lesquelles il appréciait bien plus les humains de son clan que les démons. Chez lui, les choses étaient assez simples, celui qui voulait se battre contre des forts le crier bien fort en défi et il avait de quoi à faire l'instant qui suivrait. Ici, défier la salle n'aurait aucune réaction à part peut être des éclats de rire, au mieux. C'était ça d'embêtant avec des êtres pour la plupart si individualistes que les démons, rien ne les touchaient ou ne les faisaient remuer à moins que cela les touche directement. Et puis ça avait beau arborer les airs les plus monstrueux ou terrifiants, au final la plupart n'étaient pas si puissants que cela, beaucoup de sensationnel pour pas grand chose derrière, comme l'autre idiot d'il y a un instant.

Et qui plus est, se retrouver dans le Vein n'était pas vraiment bon pour l'esprit de l'apparent jeune homme. Alors que d'ordinaire il n'en sentait absolument rien, comme s'il était un être humain ordinaire, dans cette dimension il pouvait sentit sa nature de faux-parleur venir légèrement gratter au coin de sa conscience. Comme pour rappeler sa présence et le fait qu'il pouvait sortir à tout instant pour le faire devenir une bête plus insensée encore que tous ces démons réunis. Et que seules deux petites pierres gravées et une fine cordelette empêchaient cela. Il savait que tant qu'il les auraient autour du cou, son coté démon pourrait autant grattouiller qu'il le voudrait son esprit, cela ne changerait rien, il n'avait jamais été possédé depuis ses 500 ans sans devoir en être séparé. Mais cette fine présence suffisait à lui rappeler, et ce souvenir à effacer toute bonne humeur ou espoir naissant en lui pour le ramener à ses sombres expressions renfrognées. C'était son destin qui se rappelait ainsi à son bon souvenir, et Arawn ne le voyait toujours pas d'un bon œil.

C'est donc avec un air encore plus sinistre qu'il continua résolument à attendre seul à sa table, sans toujours rien demander ou observer, simplement rester sur place et patienter. La personne qu'il espérait retrouver ici comme chaque cinquantaine d'années aurait peut être du neuf pour lui, et cela le concernait trop pour qu'il laisse tomber comme cela. Enfin, si l'individu concerné arriverait un jour! Ne sachant pas après tout ce qui aurait pu lui arriver depuis leur dernière rencontre, et devant ce retard inhabituel (Grimmel avait de nombreux défauts, dont une ponctualité exaspérante car toujours utilisée à mauvais escient), le guerrier décida d'interroger la tenancière avec toujours autant de tact et de retenu. Arawn ne se faisait jamais vraiment aux façons de faire de Lory, ce qui expliquait peut être qu'il ait réussit à la côtoyer aussi longtemps justement. Mais il aurait tout son temps pour revoir avec elle leurs vielles occupations, une fois plus au courant de son rendez-vous en attente.

Dis, Lory, tu saurais pas ce que serais devenu Grimmel par hasard? Parce que je vais pas non plus attendre ici trente ans s'il est ailleurs, on d'ennui trop par ici pour cela.

Hey? Tu crois que je vais me mettre à te filer des infos gratis maintenant? Ta vieillesse te donne pas droit à des avantages, tu sais, surtout vu le peu que tu consommes ici à chaque fois! Même le ri des démons doit casquer ici!

Dassyldroth? Faudrait déjà qu'il cesse sa manie pour qu'il passe chez toi plus qu'en un coup de vent. Et puis avec ta remarquable intelligence,tu serais pas foutue de le reconnaitre quand bien même il te passerait dessus. Mais si tu veux, je peux te prendre plus de choses quand je passe, mais je change alors de mode de payement, ma grosse....

Pas si bête en effet. Lory devait bien être la personne la plus forte du coin on dirait, vu que personne pour le moment ne sortait du lot d'inutiles communs, et depuis le temps qu'il connaissait la patronne, le chef de clan n'avait jamais eut l'idée de l'affronter. Fait étrange le concernant mais il fallait bien avouer que le caractère de la démone ne donnait pas forcement envie de s'y frotter, car on n'osait pas penser à tout ce qu'elle pourrait vous faire subir d'obscène. Une bonne petite bagarre amicale avec elle aurait au moins le mérite de l'occuper, parce qu'il s'ennuyait ferme là. Peut importe l'état dans lequel il finirait, un bon combat avait le toujours don de l'amuser!

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